Le Kon-Tiki est un radeau constitué de troncs de balsa. Il est construit par Thor Heyerdahl et ses amis. Thor veut prouver qu’on peut aller du Pérou à la Polynésie sur un radeau, un voyage de 8.000 km.
Le radeau est propulsé par une voile mais c’est surtout le courant de Humboldt qui amène le Kon-Tiki vers les îles polynésiennes. Le voyage a duré 3 mois et demi, en 1947.
Thor a écrit un livre : L’expédition du « KON-TIKI » dont voici le résumé.
Le texte en italique provient du livre.
L’océan Pacifique est le plus grand des océans. A gauche – à l’ouest – il y a les pays d’Asie, l’Indonésie, l’Australie. A droite – à l’est – il y a les Amériques. Au milieu de l’océan, il y a une multitude de petites iles montagneuses et de récifs de corail, qu’on appelle la Polynésie.
En 1937, Thor Heyderdahl et Liv Rockefeller vivent sur une petite ile de l’archipel des Marquises, au milieu du Pacifique. Thor et Liv étudient l’ile. Un des plus vieux habitants raconte les légendes d’un grand chef-dieu Tiki.
» C’est Tiki qui a conduit mes ancêtres dans ces iles où nous habitons maintenant. Auparavant nous habitions un grand pays au-delà des mers. » (12)
Aux Marquises, il y a des sculptures de Tiki en bois ou en pierre. Thor trouve que les images de Tiki ressemblent aux grandes statues de pierre des civilisations anciennes d’Amérique du sud.
En 1947, les savants pensent que les iles du Pacifique ont été peuplées pour la première fois vers 500 après J.C. au moment où Clovis est roi des Francs. Et une deuxième vague a peuplé les iles vers 1100 après J.C. au temps de la première croisade des chevaliers chrétiens.
Les iles de Polynésie sont disséminées sure une partie de l’océan Pacifique quatre fois plus grande que l’Europe. Toutes les tribus de ces iles parlent des dialectes qui viennent de la même langue, qu’on appelle polynésien.
D’où viennent les premiers habitants de ces iles ?
En 1947, quand Thor réfléchit à cette question, les savants pensent que les premiers habitants sont venus en pirogue d’Asie, d’Indonésie ou d’Australie et ont progressivement colonisés les iles polynésiennes en allant toujours plus à l’ouest. Comme le vent souffle vers l’est, les pirogues, si on ne trouve rien, peuvent facilement revenir à la voile. Ces voyageurs ont apporté avec eux des outils en pierre, ils ignoraient l’usage de fer. Thor s’intéresse aux civilisations indiennes d’Amérique du sud. Au Pérou vivait un peuple peu connu, les Incas qui ont laissé » de gigantesques statues de pierre aux formes humaines, qui rappelaient celles de Pitcairn, des Marquise et de l’ile de Pâques, et d’énormes pyramides en escaliers, comme celles de Tahiti et de Samoa. «
Thor pense que, parmi les premiers voyageurs qui se sont installés en Polynésie, certains sont venus du Pérou à l’aide de radeaux en bois de balsa. Aucun savant ne veut accepter son idée. Thor veut construire un radeau du même genre et faire le voyage pour prouver que c’est possible. Les récits des premiers Européens qui sont allés en Amérique du sud décrivent les grands radeaux indiens en bois de balsa. Ils avaient une voile carrée, une dérive et un long aviron de queue servant de gouvernail.
Thor rencontre Herman Watzinger, un ingénieur, qui est norvégien comme Thor et veut l’accompagner. Thor est d’accord et veut un équipage de six hommes. Chacun des 6 hommes conduira le bateau pendant 4 heures, c’est ce que les marins appellent un quart.
Ni Thor, ni Herman ne savent naviguer. Thor a un ami d’enfance, Erik Hesselberg, qui a été à l’école de navigation et a fait plusieurs fois le tour du monde. Il lui écrit et Erik accepte. Thor a connu pendant la deuxième guerre mondiale des résistants norvégiens, Knut Haugland et Torstein Raby, à qui il écrit et qui acceptent aussi. Knut et Torstein savent réparer et se servir de radio – qu’on appelait T.S.F. – Cela permettra de donner des nouvelles de l’expédition.
Le voyage en radeau, du Pérou jusqu’à des iles du milieu du Pacifique, va durer plusieurs mois : il faut des réserves de nourriture et d’eau. Autrefois, les indiens se sont nourris de viande séchée de lama, de pomme de terre et de poisson. Thor et ses amis ne veulent pas jouer aux indiens mais veulent vérifier si un radeau indien d’époque peut aller jusqu’en Polynésie avec un équipage. Thor pense aux rations militaires, telles qu’ils ont connues pendant la deuxième guerre mondiale. L’ambassade norvégienne à Washington met Thor et Herman en contact avec l’armée américaine. Ils vont au Pentagone, le ministère américain de la guerre, pour présenter leur projet et proposer aux militaires de tester leurs équipements. Les militaires ont des rations bien empaquetées, des allumettes qui marchent même mouillées, des couteaux qui flottent, des lambics pour distiller l’eau de mer et rendre l’eau potable, des tas d’équipements utiles. Un colonel américain les aide à convaincre le chef qui accepte de leur donner beaucoup de choses utiles pour leur expédition. Sur le chemin du retour de l’hôtel, Herman éclate de rire : il a calculé qu’on va leur donner 684 boites d’ananas et c’est son fruit favori.
Thor et ses amis sont norvégiens. Ils ont du matériel américain et veulent partir du Pérou. Le radeau doit être construit avec des grands arbres à balsa qui poussent en Équateur. Cela fait beaucoup de frontières et de problèmes à régler. Thor et Herman sont introduits aux Nations Unies et rencontrent des représentants du Pérou et d’Équateur et de Norvège qui veulent bien les aider. Et les voilà partis pour le port de Guayaquil en république de l’Ecuador (Équateur). Dans cette ville, on peut acheter des quantités de balsa mais pas des troncs entiers comme ils en ont besoin pour construire le radeau. Le seul endroit où il pousse encore de grands arbres est la forêt vierge à l’intérieur du pays. Thor et Herman veulent partir abattre des arbres mais on leur dit que c’est impossible car les pluies viennent de commencer et toutes les routes de la forêt vierge sont impraticables. On ne peut pas aller dans la forêt depuis le port mais Thor a l’idée de descendre dans la forêt depuis les montagnes. L’Équateur est un pays étrange et sa capitale Quito est perchée sur le plateau des Andes à 3000 mètres d’altitude. Jorge, qui pilote un petit avion, les amène à Quito et les aide à chercher comment aller à Quivedo, au milieu de la forêt vierge. Ils ne trouvent ni homme ni véhicule pour traverser les montagnes et la forêt. On les met en garde contre les indiens des bois qui tuent les voyageurs avec des flèches empoisonnées. Certains indiens sont même des chasseurs de têtes. Ils coupent la tête de leurs ennemis. Ils brisent et enlèvent le crâne et, avec du sable très chaud, font ratatiner la tête qui devient grosse comme une tête de chat, mais sans perdre la forme du visage. Il y a un commerce de ces têtes réduite et quelqu’un propose deux têtes à Thor et Herman. Mais même si les indiens les laissent tranquilles, il y a des brigands dans la forêt et il vaut mieux demander de l’aide aux militaires.
Agurto, un capitaine du génie de l’Ecuador, est mis à leur disposition avec une jeep pleine de bidons d’essence. Agurdo est armé jusqu’aux dents et on leur a donné aussi un gros pistolet, un parabellum. Les voilà parti dans un monde inconnu, celui où habitent les indiens de la montagne. Pendant le voyage, ils ne voient aucune voiture seulement des bergers avec leurs troupeaux de lama ou des familles avec leurs ânes et leurs mules. D’abord ils montent à 4000 mètre jusque là où la chaine des Andes tombe à pic. Puis ils descendent en virages serrés vers la forêt vierge. L’air devient de plus en plus humide et de plus en plus chaud. La pluie commence d’abord doucement puis tombe à verse – très fort. La pente de la montagne diminue et les voilà, dégoulinants d’eau chaude, en pleine forêt vierge. Il y a de la boue partout mais la jeep s’en sort jusqu’au moment où le chemin est barré par une large rivière boueuse. Quivedo est de l’autre côté, il n’y a pas de pont. Des indiens font traverser la jeep et les hommes sur un radeau de balsa et Thor, Herman et Agurdo arrivent chez Don Federico. Don Federico possède une plantation de balsa et connait les radeaux de balsa depuis son enfance.
Le lendemain, avec les hommes de Don Federico, ils partent en petits groupes à la recherche de grands arbres. Don Federico les conduit à un arbre gigantesque. Selon la coutume des iles du Pacifique, l’arbre est baptisé Kou avant d’être abattu à coup de hache. » En une semaine, Kou a été suivi par Kane, Kama, Ilo, Mauri, Ra, Rangi, Papa, Taranga, Kura, Kukara et Hiti, douze énormes balsas, tous baptisés en l’honneur des figures légendaires polynésiennes, dont les noms originaires du Pérou, avaient jadis traversé les mers avec Tiki. » Les troncs des arbres sont plein de sève et pèse chacun plus de 1000 kg. Les hommes les amènent à la rivière et les attachent avec de grosses lianes. Deux hommes les accompagnent et guident la descente des troncs le long de la rivière. Herman va jusqu’à la mer et il fait charger les troncs sur un bateau à vapeur à destination du Pérou.
Thor part pour Lima, capitale du Pérou, pour obtenir l’autorisation de construire le radeau dans le port de Callao. Thor a une lettre de recommandation pour le président de la république péruvienne qui le reçoit. Un général traduit en espagnol la présentation du projet que fait Thor en anglais. La théorie que des ancêtres péruviens aient découvert des iles de Polynésie intéresse le président et il donne l’ordre qu’on aide ce projet. Le radeau sera construit dans une cale du chantier naval militaire. Les journaux en parlent et Thor reçoit la visite d’un savant suédois Bengt Danielson qui demande à les accompagner sur le radeau : le sixième homme est trouvé et il parle espagnol, tant mieux. Il faut penser à mille choses et faire beaucoup de démarches. Torstein a pesé les courriers échangés : 12 kilos de correspondance !
Enfin, les 6 hommes sont réunis à Lima. Dans l’arsenal militaire, tous le matériaux sont réunis : troncs de balsa, bambous jaunes, feuilles de bananier. Pour la première fois depuis des centaines d’années, on construit un radeau de balsa dans la baie de Callao, à côté de Lima.
Neuf gros troncs sont choisis, mis côte à côte et solidement attachés par de grosses cordes de chanvre. D’autres troncs sont attachés dans l’autre sens, ce qui forme la base du radeau. Un pont de bambou est fixé et une petite cabine de bambou est construite avec des murs en tiges tressées et un toit en feuilles de bananier. A l’avant, deux mats en bois de manguier – dur comme du fer – sont dressés. La vergue est en bambou; c’est la longue traverse fixée aux mats qui soutient la voile. Un radeau n’a pas de quille comme un bateau – le radeau est plat – mais il y a 5 planches qu’on fixe entre les troncs et qui s’enfoncent dans l’eau : elles forment de toutes petites quilles parallèles qui empêchent le radeau d’être poussé de côté par les vents ou les courants.
Dans l’ensemble, le radeau est une copie fidèle des radeaux de l’ancien temps du Pérou et de l’Ecuador. Beaucoup de diplomates, de militaires, de marins viennent visiter le radeau et donnent leur avis : le radeau ne supportera pas le voyage, ni les tempêtes, ni les vagues, etc. Mais les 6 hommes gardent leur calme et continuent leurs préparatifs. On embarque sur le radeau des provisions – beaucoup de rations militaires – pour quatre mois, l’eau et tout l’équipement. Le 27 avril 1947 est hissé le pavillon de Norvège ainsi que les pavillons des pays qui ont aidé l’expédition. Le radeau est baptisé « Kon-Tiki » avec du lait de coco. Le 28 avril 1947, avec 6 hommes et un perroquet vert à bord, le remorqueur Guardian Rios quitte le port avec le Kon-Tiki accroché derrière lui. Le câble casse, le remorqueur manque d’écraser le radeau ! Au bout d’un jour, le remorqueur les laisse à 50 milles marins (soit environ 80 kilomètres) de la côte.
Le vent du sud-est se lève et il faut apprendre à diriger le bateau, comme le faisait les indiens. Il faut maintenir le radeau dans une position où la voile est gonflée de l’arrière. C’est le barreur qui doit garder la direction grâce à l’aviron de gouverne. Cet aviron mesure six mètres et est en ois de manguier, très solide mais très lourd, il se termine par une grande pale de sapin qu’il faut maintenir à la verticale, ce qui est très fatiguant.
Le radeau a rejoint le courant de Humbolt, c’est un courant froid qui longe les côtes du Chili et du Pérou et qui est très poissonneux. La houle est forte à cause du vent et du courant. Les hommes s’attendent à être écrasés sous des montagnes d’eau mais le Kon-Tiki suit le mouvement des vagues. Par contre il faut garder le cap pour que les vagues viennent toujours de l’arrière. Les deux hommes à la barre luttent incessamment contre les vagues et s’attachent pour ne pas être emportés. Au bout d’une heure et demie, deux autres hommes les remplacent et ils peuvent aller dormir tout mouillés pendant trois heures dans la cabine.
Au bout de trois jours, la mer se calme un peu et les vagues, même si elles restent hautes, vont dans le même sens, soulèvent le radeau et passent sous le plancher. Les vieux maitres du Pérou savaient ce qu’ils faisaient en construisant des petits radeaux plats au lieu de grands bateaux qui peuvent se remplir d’eau.
Le courant les amène au Nord et les hommes ont peur de passer trop près des remous des Galapagos. Ils s’inquiètent pour les troncs de balsa qui s’imprègnent d’eau et deviennent de plus en plus lourds. On leur avait aussi dit que les cordes qui tiennent les parties du radeau allaient s’user mais heureusement le balsa est un bois tendre où les cordes s’enfoncent et se mettent à l’abri. Plus ils s’approchent de l’équateur – la ligne … – et s’éloignent de la côte, plus les poissons sont nombreux. Plus d’une fois, un homme a reçu un poisson volant en pleine figure. Et tous les matins, le cuisinier ramasse les poissons volants échoués sur le pont pendant la nuit, au moins 6 et une fois 26 poissons bien gras. Une nuit, Torsten est réveillé par un poisson qu’il veut attraper mais cela le brûle. Herman attrape par le cou un poisson d’un mètre, fin comme un serpent, avec une gueule pleine de dents tranchantes. C’est la première fois que des humains voient ce poisson vivant, qu’on appelle gempylus ou maquereau-serpent. Les savants pensaient qu’il vit à grande profondeur mais on voit qu’il remonte à la surface la nuit.
Une nuit, ils croisent 3 véritables monstres luisants, plus grands que des éléphants, qui dansent des heures devant eux. Un jour et demi plus tard, Knut se trouve en face d’une très grosse tête monstrueuse prolongé par un corps énorme. Le monstre est un requin-baleine, le plus grand poisson connu (les baleines sont des mammifères pas des poissons). Un requin-baleine mesure en moyenne 15 mètres et peut peser 15 tonnes, c’est à peu près la taille et le poids d’un autobus.
Les semaines passent. Que font les six hommes ?
D’abord, chacun passe deux heures de jour et deux heures de nuit à la barre du radeau.
Thor est le chef de l’expédition, il rédige le journal de bord, pêche et filme.
Erik est le navigateur, il répare les voiles et les cordages, et tous les jours il observe le soleil avec un sextant et calcule le chemin parcouru. Il joue aussi de la guitare et sculpte du bois.
Bengt est le chef cuistot, il gère les provisions. Comme il est anthropologue, il a emmené beaucoup de livres savants qu’il étudie.
Herman est le chef technique, il vérifie que tout va bien et s’occupe des observations de la météo et de la mer.
Knut et Torsten sont responsables de la radio, qu’il faut maintenir en état malgré l’humidité. Chaque nuit, à tour de rôle, ils envoient les rapports et les bulletins, sans savoir qui les écoutent. Ce sont des radios amateurs qui reçoivent les messages et les transmettent à leurs destinataires.
Il y a assez de provisions et assez facilement des poissons à pêcher mais il faut faire attention à l’eau. Les hommes ont emmené de l’eau dans de grands bambous creux et bouchés mais au bout de deux mois, l’eau a mauvais goût. On peut apaiser sa soif en se baignant souvent – attention aux requins – ou en mâchant du poisson. On peut aussi presser le poisson pour récupérer du liquide. Lorsqu’on souffre de la soif, notre corps a besoin d’eau mais aussi du sel. En ajoutant de l’eau de mer à l’eau douce, les hommes étanchent mieux leur soif et économisent de l’eau.
Des gens sont morts de faim en mer car ils n’arrivaient pas à pêcher d’assez gros poissons. Pourtant ils naviguaient peut-être dans une soupe de plancton, qui flotte en quantité incalculable dans l’océan. Le plancton est le nom de milliers d’espèces d’organismes, petits, très petits ou microscopiques. Certaines espèces sont es plantes, d’autres de très petits animaux. Le plancton végétal se nourrit des éléments chimiques, le plancton animal vit du plancton végétal, de nombreux animaux marins – y compris les baleines – mangent le plancton et sont eux-même mangés par d’autres animaux.
Le plancton est la vie de l’océan et avec un filet très fin – en soie – les hommes pêchent le plancton. L’odeur est désagréable et la vue horrible, mais chaque créature individuelle a des formes et des couleurs fabuleuses. Le plancton animal est délicieux si on a le courage de le manger, quatre des 6 hommes en mangent.
Le radeau reçoit souvent la visite de marsouins et autres petits cétacés et quelquefois de gros cachalots et baleines qui s’approchent mais ne leur font aucun mal. Les poisson les plus fidèles au radeau sont les dorades et les pilotes, des poissons qui suivent les requins. Les hommes pêchent les dorades avec des poissons-volants. Comme les hommes pêchent quelquefois des requins, les pilotes du requin pêché adoptent parfois le radeau comme seigneur et maître. Le Kon-Tiki a une suite d’une cinquantaine de pilotes et certains l’ont suivi pendant des milliers de kilomètres.
Au bout de 45 jours de traversée, le radeau est à mi-chemin, à 4000 km à l’ouest de sa destination, la Polynésie. Les hommes n’ont croisé aucun bateau et n’en croiseront aucun. Les militaires américains ont fourni un dinghy, un bateau gonflable à utiliser en cas de naufrage. Par mer calme, des hommes prennent le dinghy pour aller faire une promenade à rame autour du radeau. Une catastrophe manqua de se produire. Le vent s’étant levé, le Kon-Tiki filait vers l’ouest. Même en baissant la voile du radeau, les hommes sur le dinghy eurent du mal à rattraper le radeau. Par la suite, les promenades dans le dinghy se sont faites au bout d’une longue corde pour ne plus risquer d’être séparés.
Knut et Torsten ont du travail pour maintenir la radio en fonctionnement. L’humidité abime les piles et, comme l’eau conduit l’électricité, dans le coin de la radio, on sent des secousses électriques. Mais ça marche et régulièrement Knut et Torsten entrent en contact avec un radio amateur et échangent des informations. Le perroquet a coupé l’antenne avec son bec, et ila mangé des bouts d’antenne ce qui l’a rendu malade. C’est devenu le meilleur ami de Torstein et Knut, il dort dans la cabine à côté de la radio. Malheureusement, le perroquet est un jour emporté par une grosse vague, les hommes sont triste et en plus déprimés à l’idée que ça pourrait leur arriver.
La nuit du 2 Juillet 1947, le radeau rencontre trois grands murs de lame – des énormes vagues. Et deux jours après, ils affrontent leur première tempête avec des vagues jusqu’à six à sept mètres. Les hommes baissent la voile et l’attache à la vergue. Ils attachent aussi tout ce qui peut bouger et protègent la radio. Quand tout est en ordre pour affronter la tempête, une certaine peur se lit dans leurs yeux. Mais le Kon-Tiki passe par dessus les obstacles, il monte au sommet des vagues comme un bouchon et redescend, en recevant des masses d’eau qui se brisent avec un bruit de tonnerre. Le barreur a de l’eau jusqu’à la taille.
Quand la tempête se calme, les poissons sont devenus fous. Le radeau est entouré de requins, de thons, de dorades. Les thons poursuivent les dorades et se battent contre les requins. Les hommes pêchent neuf requins, mais comme l’odeur du sang en attirent encore plus, ils jettent tous les cadavres à l’eau, nettoient le pont et jettent les nattes de bambou ensanglantées. La viande de requin n’est pas très bonne à manger, il faut faire partir un mauvais go^t d’ammoniaque en le laissant tremper dans l’eau de mer.
Le 21 Juillet, le vent tombe, annonçant une nouvelle tempête. Une rafale de vent emporte le sac de couchage de Torstein et Herman tombe à l’eau en voulant le rattraper. On met le dinghy à l’eau mais la corde est trop courte. Alors Knut plonge avec une ceinture de sauvetage dans une main, qui est attachée à une longue corde. Knut arrive à rejoindre Herman et les quatre autres hommes les ramènent, grâce à la corde, jusqu’au radeau. Ils n’ont pas le temps de réfléchir à ce qui s’est passé car la tempête va durer cinq jours. Le Kon-Tiki en ressort un peu désarticulé, le gouvernail cassé, la voile déchirée et les dérives complètement usées. Les cordes ont raboté un peu les troncs de balsa, heureusement qu’on n’a pas utilisé de fl de fer : ça aurait coupé les troncs. Les hommes réparent ce qu’ils peuvent, et même si les troncs ont absorbé beaucoup d’eau, le Kon-Tiki va pouvoir continuer son voyage. Comment va-t-il finir ? La tempête les a laissé à 300 miles des iles des Marquises et du groupe Tuamotu, mais le radeau peut très bien passer entre les deux sans les voir. L’ile de Fatuhiva n’est pas si loin, l’ile où Thor a vécu et où cette histoire a commencé. Les hommes commencent à voir des oiseaux, qui sont des signes que des terres sont proches. Ils prennent la direction vers où les oiseaux repartent le soir.
Dans la nuit du 29 au 30 Juillet, le vacarme des oiseaux leur annonce l’approche de la terre. Au matin, ils découvrent une ombre légère à l’horizon. La terre ! Une ile ! Selon les calculs d’Erik, c’est Puka-Puka, l’avant-poste du groupe Tuamotu. Mais la direction du vent et des vagues ne leur permettent pas d’atterrir et l’ile disparait peu à peu, leur laissant une odeur de feuilles et de verdure. Une nouvelle ile apparait avec une position idéale, juste sur leur chemin. Attention : les iles du groupe Tuamotu sont entourés de bancs de corail submergés où d’innombrables bateaux, pris dans le ressac – le retour des vagues – se sont brisés en mille morceaux. Le radeau ne peut aller contre le vent et il longe le banc de corail pour trouver une ouverture où faire entrer le radeau.
Toute la journée le radeau zigzague le long de l’ile, s’approchant puis s’éloignant pour ne pas être attrapé par les vagues. Le soir, les hommes aperçoivent un groupe de taches noires sur la grève de l’ile. Le radeau s’approche, les taches noires deviennent des humains dont deux montent dans une pirogue et viennent vers eux. Les indigènes montent à bord et l’un leur dit « Good night », c’est tout son vocabulaire en anglais. Tjor arrive à peu près à leur faire comprendre qu’ils veulent rejoindre la terre. Les indigènes font « Brrr… » ce qui veut dire de démarrer le moteur. Les indigènes sont très surpris qu’il n’y ait pas de moteur et partent chercher des renforts. Il n’y a que quatre pirogues sur l’ile qui reviennent bientôt et s’attachent au radeau, comme un attelage de chien de traineau. Tout le monde peine à leurs pagaies en chantant mais le courant est très fort : le radeau dérive vers le large. Au bout d’un moment, les indigènes retournent à leur ile, Angatau, et le Kon-Tiki continue sa route.
C’est dangereux car le radeau dérivent vers le récif de Takume, le naufrage est inévitable. Les hommes s’y préparent : les objets de valeur sont attachés dans la cabine, les papiers et les films sont mis dans des sacs imperméables et la cabine est recouverte de toile. Le mot d’ordre est de s’accrocher au radeau et de ne pas tomber dans la mer car le ressac les entrainerait sur les coraux coupants. Le Kon-Tiki est pris dans les lames du ressac, les hommes sont submergés sous des masses d’eau et n’ont qu’une pensée : tenir bon, tenir.
Finalement, le Kon-Tiki heurte le récif : en quelques secondes, le radeau où ils ont vécu plusieurs mois est devenu une épave toute disloquée. Par chance, tout le monde est encore à bord et arrivent à sauter sur le récif. A l’intérieur du récif, dans le lagon, ils retrouvent leur canot de sauvetage, flottant et plein d’eau. Les hommes s’en servent pour décharger le matériel de l’épave et le stocker sur un énorme bloc de corail. L’eau n’est pas profonde et les hommes pataugent à travers le lagon jusqu’à une petite ile couverte de palmiers.
Le voyage a pris fin. Les hommes sont vivants et échoués sur une petite ile déserte du Pacifique, au cœur même de la Polynésie.
La petite ile est inhabitée. Aux cimes des arbres pendent des grappes de noix de coco, pleines de lait de coco. Pour manger, il y a des noix de coco mûres, quantité de bernard-l’ermite et toutes sortes de poisson dans la lagune. L’appareil de radio est trempé, il faut vite le réparer pour pouvoir communiquer. Les hommes récupèrent la voile et la tendent entre deux grans palmiers et deux tiges de bambou. Voilà un toit sous lequel ils installent des lits faits de feuilles sèches de palmier. Juste avant le naufrage, Torstein et Knut ont parlé avec un radio amateur de Rarotonga qui doit appeler les secours s’il n’a pas de nouvelles au bout de 36 heures. Les batteries de la radio sont complètement à plat, ils doivent tourner la manivelle d’un petit générateur d’électricité pour produire du courant. Torstein appelle des radios amateurs avec lesquels il a déjà discuté mais personne ne répond. Alors il diffuse un message général « Tout va bien, tout va bien, tout va bien. » Il faut empêcher une expédition de secours de se mettre en route. Erik et Herman visitent les iles environnantes en pataugeant à travers le lagon : il faut faire attention à d’effroyables anguilles aux dents venimeuses.
Les jours passent jusqu’à apercevoir une voile blanche sur la lagune qui vient vers eux, bientôt rejointe par une deuxième pirogue. L’un des indigènes parle un peu français, ils viennent d’un village polynésien sur une ile située de l’autre côté de la lagune. Les polynésiens ont vu le feu allumé par les six hommes et des débris du Kon-Tiki sont arrivés sur la plage du village. Bengt repart avec les deux pirogues et le lendemain, l’horizon fourmille de voiles blanches. Teka, le chef du villag, a été à l’école à Tahiti et parle français. Les indigènes sont stupéfaits de voir que le Kon-Tiki n’est pas un bateau mais un pae-pae, le mot polynésien pour radeau ou plate-forme. Les indigènes sont en admiration devant les troncs de balsa mais font la grimace devant les cordes. Leurs cordes, qu’ils tressent eux-mêmes avec du chanver de cocotier, sont beaucoup plus solides que les cordes modernes du Kon-Tiki. Les six hommes veulent ramener le Kon-Tiki sur la plage qui est échoué sur le récif. Le chef dit que l’épreuve va venir dans la lagune car il va y avoir une grande marée. Effectivement à marée haute, le radeau est soulevé du récif et avec l’aide de tous, il est ramené sur la plage.
Bengt et Herman sont partis au village pour aller voir un petit garçon, en train de mourir d’un abcès à la tête. Les indigènes viennent chercher les quatre autres hommes et la cargaison récupérée du Kon-Tiki et les amènent à leur village. Ils sont accueillis par le chef Teka et le vice-chef Tupuhoe et les villageois leur chantent la Marseillaise, l’hymne national français, que Teka leur a appris, puis un chant polynésien. Ensuite Thor, grâce à la traduction de Teka, explique à l’assemblée du village pourquoi ils ont traversé les mers sur un pae-pae (un radeau). Les plus anciens du village se souviennent que leurs aïeux utilisaient des radeaux et connaissent des légendes qui racontent que les premiers habitants de leurs iles venaient de Pura, la partie de l’horizon où le soleil se lève. Les jeunes ont plutôt envie d’entendre parler du requin-baleine et du voyage à travers l’océan. Puis tout le village (127 personnes) vient échanger une poignée de main avec chacun des six hommes et alors commence une fête de bienvenue. On leur sert des poulets, canards et cochons de lait rôtis, des homards, des poissons, des fruits de l’arbre à pain, des papayes et du lait de coco. Ensuite, le village fait une démonstration de ses danses populaires, c’est la première fois que des hommes blancs assistent au spectacle. Au bout d’un moment, les hommes rejoignent la danse sauf Erik, mais il est finalement entrainé par une matrone, une dame corpulente aux muscles puissants. Après la fête, les hommes vont se reposer après avoir échangé une poignée de main avec les 127 personnes du village, cérémonie répétée chaque matin et chaque soir pendant tout leur séjour au village.
Le lendemain, le petit garçon malade va très mal, il a 40° de fièvre et un abcès gros comme le poignet. Knut et Torstein sortent l’appareil de T.S.F et entrent en contact avec leurs amis invisibles qui appellent un docteur. En morse, ils transmettent les symptômes de la maladie et la liste des médicaments dont ils disposent. Et ils reçoivent les instructions du docteur. Herman et Knut ouvrent l’abcès avec un couteau stérilisé à l’eau bouillante, nettoient la plaie avec un antiseptique, bandent la tête du petit garçon, Haumata, et commencent un traitement à la pénicilline. Une semaine plus tard, Haumata joue sur la plage avec les autres enfants, la tête entourée d’un énorme bandage. Et il guérit.
Ensuite, les malades affluent et les docteurs improvisés Knut et Herman les soignent à l’aide des pilules et des pansements jusqu’à ce que la boite de secours soit vide. Quelques jours plus tard, une nouvelle cérémonie a lieu pour adopter les six hommes comme citoyens du village, Raroïa, et leur donner des noms polynésiens.
Une nuit, par T.S.F., ils reçoivent un message de bienvenue du gouverneur des colonies françaises polynésiennes et on leur annonce qu’on viendra les chercher avec le bateau officiel Tamara pour les amener à Tahiti, d’où ils pourront rentrer dans leur patrie. Les iles sont visitées de temps à autre par un bateau, le Maoae, qui vient chercher du copra, la chair blanche de la noix de coco, qu’on fait sécher. Le copra est transformé en huile et utilisé dans l’industrie des cosmétiques, c’est une richesse des iles polynésiennes.
Le Maoae arrive une nuit pour chercher le copra de Raroïa mais bien que l’équipage connaisse bien le récif, un courant traitre les a entrainé sur un récif invisible où il s’est échoué. Heureusement, le navire officiel, le Tamara, arrive et remorque le Maoae hors du récif jusqu’à la lagune. La coque a été abimée et les plongeurs de perle plongent pour réparer les voies d’eau les plus importantes.
C’est le temps des adieux, tout le village les accompagnent en chantant et pleurant, surtout Tupujoe et Haumata. Le Tamara remorque le Maoe hors du récif et attache le radeau derrière lui. En quatre jours, ils arrivent à Tahiti où la population les attend pour vois le pae-pae qui vient d’Amérique.
Thor retrouve un vieux chef Teriieroo qu’il a connu lors d’u séjour à Tahiti. Terrieroo organise une grande fête où on leur donne aussi des noms tahitiens. Les jours et les semaines passent, plein d’insouciance. Enfin, un paquebot norvégien, le Thor I, arrive de Samoa pour les conduire en Amérique. Le Kon-Tiki est hissé à bord et voilà les six hommes qui retournent vers le vingtième siècle après une aventure extraordinaire.